C4 POUR UNE PENSÉE MANAGERIALE

POUR UNE PENSÉE FRANCAISE EN SCIENCE DU MANAGEMENT

 

 

 

Monsieur XXX

Rédacteur en chef

Le Figaro Economie

75081 Paris

 

Paris, le 23 Octobre 2000

 

Monsieur le rédacteur en chef,

 

Lecteur attentif du Figaro depuis plus de 50 ans, notamment des pages et suppléments du « Figaro Economie » saumon, je ne peux m’empêcher de réagir à la lecture des articles que vous venez de publier, le 24/10/2000, sur « Le Knowledge Management », article signé de personnes probablement attachées à votre rédaction ; en effet, sous leur nom, ne figure ni titre, ni référence personnelle permettant d’évaluer leur expérience dans le domaine qu’ils abordent. C’est pourquoi c’est auprès de vous-mème que je me permets d’exprimer ma réaction.

 

Je lis dans le « texte annonce » paru Samedi à propos du « KNOWLEDGE MANAGEMENT, OU GESTION DES CONNAISSANCES »: « CE CONCEPT ANGLO-SAXON MIS EN OEUVRE PAR UNE FORTE MAJORITE DES GRANDS GROUPES AMÉRICAINS COMMENCE À ETRE ADOPTÉ PAR LES ENTREPRISES FRANCAISES « .

 

Un grand journal comme le votre ne peut laisser écrire une telle contre-vérité, associant sa voix à ceux qui prennent plaisir au dénigrement de notre pays ( ou à l’auto-flagellation), ou à ceux qui se laissent prendre au mirage de l’idée, répandue par les américains, à savoir que hors les Etats-Unis il n’y a pas de place pour une pensée originale, en langue française notamment, en matière de Management.

 

Contre-vérité en effet, car nous avons lancé ce « concept » en 1985 avec la publication d’un livre réédité deux fois, intitulé « L’Excellence Technologique » qui a fait l’objet d’un très grand nombre d’articles de presse, y compris, le 19 Septembre 1985, d’un des collaborateurs du Figaro qui s’en était fait l’écho parmi 30 ou 40 autres citations que je pourrais vous communiquer, sans parler, à d’autres occasions, de pleines pages dans certains journaux (Les Echos d’octobre 85,..), revues....

Il est vrai que je n’ai pas employé de termes anglo-saxons pour parler du « knowledge management » à la française, mais de « Management des Ressources Technologiques », le terme « ressources technologiques », plus riche, englobant en particulier les connaissances, les compétences, les savoir-faire, mais aussi bien d’autres choses encore que les américains n’ont pas encore pris en considération

 

Car il faut savoir qu’à l’époque, alors que nous, français, écrivions des livres et des articles sur ces thèmes, que nous organisions, en France, des cours de formation initiale et continue dans un certain nombre d’Ecoles, que des entreprises françaises, et non des moindres, s’engageaient dans ces démarches, mes amis américains (consultants, universitaires, managers) considéraient qu’il s’agissait là d’une préoccupation bien française, qu’aux USA, quand on manquait de certaines compétences, on allait les chercher chez le concurrent... Soyons juste, un rapport publié en 1987, à la demande du Sénat faisait état de l’intérêt que les entreprises américaines devraient porter à leur « technological resources »; il n’a eu guère d’écho dans les revues spécialisées.

 

Depuis 1985 j’ai, pour ma part, publié 3 livres sur ce sujet (dont un à l’attention des PME, deux ré-éditions, traduction italienne, espagnole) et plus de 20 articles, contribué à créer un MASTERE spécialisé à Marseille, alors que d’autres enseignement était dispensé dans diverses écoles à Paris, Lyon, Grenoble, Nancy,...

 

En 1987, nous avons, avec R.SEURAT, créé une société de conseil « EUROSTART » spécialisée dans la mise en oeuvre de ces concepts nouveaux avec des outils originaux appropriés. Plusieurs grandes sociétés de conseil américaines se sont portées candidates à une reprise.

 

Il faut savoir aussi que

 

- Merlin-Gérin, français, a été la première entreprise (au monde, à ma connaissance) à avoir créé, en 1990, une « DIRECTION STRATÉGIQUE DES COMPÉTENCES «  et je pense n’être pas totalement étranger à cette innovation (impensable pour des américains,...alors),

 

- d’autres entreprises se sont engagées, Pechiney, Framatome, C.E.A., ...., sous des formes ou d’autres, plus ou moins accomplies, dans l’application de ce « concept » pour reprendre votre terminologie,

 

- le CETIM, Centre Technique des Industries de la Mécanique , a fait un travail considérable et remarquable pour mettre au point des outils appropriés aux P.M.I. et les diffuser dans cette immense Fédération des Industries de la Mécanique et de la Métallurgie,

 

- les Pouvoirs publics ont accompagnés sous différentes formes les actions entreprise, notamment l’organisation, en 1992, des « Grands Colloques « GERER LES RESSOURCES TECHNOLOGIQUES » (= gérer les compétences)....

 

En janvier 1994, le rapport d’Orientation de la Recherche Française, s’inspirant très directement des travaux effectués, en FRANCE, par les uns et les autres, écrivait: «  ...on doit donner autant d’importance à la gestion des connaissances (valorisation, communication,..) qu’à l’acquisition de la connaissance (recherche, ...). Plus loin, il évoque la nécessité de renforcer, dans les P.M.I., « une compétence interne minimale permettant à l’entreprise d’acquérir et d’utiliser les savoirs technologiques qui lui sont accessibles ».

 

Pour dire cela, point n’a été besoin d’attendre la bonne parole de nos amis américains qui, alors, s’intéressaient surtout au « concept IT (« Technologies de l’Information ») dont leur « Knowledge Management » (KM) est issu en partie. Ce qui explique d’ailleurs que le KM ne saurait aller aussi profondément que nous le faisons dans la problématique sociale de l’entreprise, « notre » Management des Ressources Technologiques apportant un nouvel éclairage aux rapports sociaux .....

 

A ce propos, je doute que tous vos lecteurs de l’article page 76, « Un remodelage des fonctions », comprennent que s’il est écrit, parlant des ingénieurs, que « cette notion de management de l’humain leur échappe un peu », il s’agit des ingénieurs de France Télécom, entreprise qui découvre, aujourd’hui, les voies dans lesquelles les entreprises privées françaises se sont engagées depuis plus de 30 ans..

 

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Pour illustrer mes propos, je vous adresse copie d’un certain nombre de coupures de presse, une liste bibliographique, des tirés à part.

J’espère qu’ils inciteront votre rédaction à faire un autre dossier qui, faisant le contrepoids au tropisme outre-Atlantique de vos articles sur le « knowledge management », montrera qu’en France on innove aussi en matière de Management, et dans ce domaine précisément bien avant les américains, et contribuera à expliquer aux jeunes que hors les USA il y a aussi des hommes et des femmes qui disent et font des choses qui méritent d’être pris en considération.

 

Je suis tout à fait disposer à donner des pistes pour une enquête objective sur le thème:

« en matière   de management   aussi   la pensée   française est   innovatrice ».

  

               . Aucun écho…